Au revoir et merci

Suzette voulait voir la vicomtesse avant son départ. Certes, il ne s'agissait pas d'adieux puisqu'elle avait prévu de revenir et de vivre en Champagne mais tout de même, son escapade serait très longue.
Elle espérait être de retour pour l'épiphanie, voir fin janvier au plus tard.

L'auvergnate avait revêtu son élégante houppelande afin de se présenter dans une tenue décente face à Oksana.
Cette dernière devait se trouver quelque part dans ses appartements.
Elle la trouva finalement dans un des grands salons de la demeure, ou peut-être était-ce la bibliothèque, le bureau peut-être? Cette demeure comptait tellement de pièces que Suzette ne les avait pas toutes retenues.
A Aurillac, sa chaumière se composait d'une petite écurie, d'une chambre minuscule et d'une pièce qui faisait office à la fois de cuisine, salle à manger, bureau etc...

La vicomtesse se tenait là.
Suzette frappa à la porte déjà ouverte pour s'annoncer. Elle pénétra dans la pièce, s'inclina poliment et pris la parole :

- Bonjour vicomtesse, je suis ravie de vous voir. Je m'en retourne vers mon auvergne natale dès demain. Me voilà remise une fois de plus de mes blessures et avec la trêve, je souhaite en profiter pour rentrer. J'ai pris la décision de quitter mes volcans pour venir vivre en Champagne. J'ai plusieurs formalités à régler à Aurillac afin de finaliser mon déménagement. Je profite de cette escapade pour me rendre à Bayonne y aider un ami qui souhaite lui aussi rejoindre la Champagne.

Petit sourire... Voilà que la Champagne, ruinée et dévastée, attirait les étrangers ! Elle aurait vraiment tout vu.

- J'espère être de retour pour le début de l'année nouvelle, fin janvier dans le pire des cas.
Je tenais à vous remercier du fond du coeur pour votre accueil et pour tout l'apaisement que j'ai pu trouver en ces murs. Les gens du domaine ont été formidables et si aujourd'hui je me porte aussi bien c'est grâce à vous, à eux. Je pense en particulier à Hersent qui est devenue ma supérieur, à Klouska pour son attention, à Cortès aussi. Je n'oublie pas non plus la gourmandise de Maccro ou les ronchonneries de Kelso. Et je pense aussi à ces anonymes croisés par ci par là sur le domaine. Merci...

Restait le plus difficile à demander. Suzette n'avait pas l'habitude de solliciter l'aide d'autrui. Débrouillarde et solitaire, ce n'était pas dans ces us. Mais là, elle souhaitait faire exception. Son ton était un peu hésitant, elle ignorait tout des protocoles de bonne conduite et ignorait surtout si ça se faisait qu'une paysanne sollicite un service auprès d'une vicomtesse. Elle s'y risqua malgré tout :

- Je voulais vous demander une faveur. A mon retour, j'aurais souhaiter revenir ici, dans votre domaine et continuer à y vivre comme jusque maintenant. Bien entendu, le contexte n'aura plus rien à voir avec les premières raisons de mon arrivée ici mais...euh...enfin je...

Voilà qu'elle bafouillait un peu. Et quand Suzette bafouillait, elle rougissait. Et lorsqu'elle sentait ses joues rosir, elle bafouillait. Bref, elle était mal embarquée et, pour éviter de s'enfoncer dans le ridicule, elle se tut, n'achevant même pas sa phrase.

Hersent avait reçu un pigeon de la part de Suzette, cette dernière lui annonçait son départ pour le lendemain. Elle avait pris sur elle de lui accordé une longue permission, ainsi qu'à son amie auvergnate Cendrillon. Elles avaient toutes deux mériter un peu de repos, elles qui avaient versé leur sang pour la Champagne. Elle avait entendu parler dans un des salons de La Demeure et avait reconnu la voix de son soldat auvergnat. Aussi, toqua-t-elle discrètement à la porte avant d'entrer dans la pièce. Suzette discutait avec la Vicomtesse , Hersent salua respectueusement sa suzeraine et vint donner l'accolade à Suzette...qu'elle interrompit dans son élan...ou qu'elle sauva d'un plus grand embarras.

Bonjour ma Suzeraine! Je suis ravie de vous voir...vous vous faisiez rare ces temps derniers. Encore à cause de ces maudits artésiens! J'ai entendu la voix de Suzette et j'ai voulu lui dire un au revoir moins protoclaire qu'à la caserne.
Suzette...vous allez me manquer ainsi que Cendrillon. Le colonel Pétillante et moi serons de nouveau les seules touches féminines de la caserne. Alors, toutes les deux vous avez intérêt à revenir soutenir vos soeurs d'armes, seules au mileu d'une meute masculine. je vous en prie, faites attention sur les chemins...j'aurais aimé que vous passiez la Noël en notre compagnie...ce sera pour l'an prochain.
Surtout, interdiction de me laisser sans nouvelles régulières, hein!!! Même deux lignes suffiront à me rassurer. Vous savez bien que je m'inquiète très vite pour mes Loups et Louves...alors si vous avez pitié de votre GES, un pigeon pour lui dire que tout va bien suffira à son bonheur.

Elle regarda Suzette, si vive, si malicieuse, si volontaire et rieuse...un rayon de soleil partait pour mieux revenir.

Tenez Suzette, prenez ce paquet. Il contient des préparations pour gérer les différents maux que l'on peut rencontrer lors des voyages. Et puis, j'ai mis pas mal de tisanes pour que vous pensiez un peu à votre herboriste de Bourmont. Je sais que la tisane ne vaut pas une bonne pinte mais lors des bivouacs, cela peut être revigorant. Il y a aussi des pots de baumes pour les ampoules, les maux de gorge, les engelures et les blessures. J'ai mis aussi des compresses, des lotions antiseptiques et anti hémorragiques...on ne sait jamais. Elle vérifia le contenu du paquet puis reprit Je crois que tout y est.

Elle était plus émue qu'elle ne souhaitait le montrer...elle détestait les au revoir et les départs...trop d'émotions à contenir.

Fatiguée. Une fois de plus, elle se sentait anéantie, sans forces et surtout sans aucune motivation pour rien. Elle n'allait plus au conseil de Champagne, se contraignant seulement à se rendre à la pairie afin d'honorer la confiance qui avait été placée en elle par ses com-pairs et par la Reyne elle-même lors de l'acceptation de son dossier.
Pourtant, des projets, elle en avait. Mais aucune force pour les mener à bien. Se reposer une fois encore sur ses vassaux et les habitants du domaine pour la sortir de sa torpeur n'était pas la bonne solution. Les morts étaient morts et elle avait beau tenter de se raisonner, elle n'y arrivait pas.

Des pas puis une entrée pour le moins inattendue la sortie de sa noirceur hivernale.

Bonjour Suzette, contente de vous voir.

Elle n'eut guère le loisir de lui répondre qu'Hersent arriva à son tour avec un colis spécial malades ! Elle rit à l'attention de sa vassale.

Tu vas lui porter malheur avec tout ton attirail. Ce n'est pas parce qu'elle est arrivée blessée, fatiguée et mal en point que son voyage de retour sera identique. Enfin, je l'espère sincèrement. Et puis, je crois qu'avec tout ce que tu as mis dans ton paquet, son cheval ne pourra même plus la porter si elle a quelques affaires à transporter.

Elle se retourna vers Suzette et lui prit les mains :

Sachez que vous êtes et serez ici toujours la bienvenue et que je ne dis jamais de paroles en l'air. Je vous ai accueilli ici, vous avez été adoptée par tout le monde dans le domaine et vous êtes maintenant chez vous. Ce sera donc avec un grand plaisir que les grilles vous seront à nouveau grandes ouvertes, et avec votre amie également si vous le désirez. Dépêchez-vous donc de revenir si vous ne voulez pas que le râleur en chef aille vous rechercher en personne.