[Rp] Divin est le vide qui suit la disparition de la peur

Armure bourmonesque Nombre de messages : 3557 Date d'inscription : 08/06/2009

… Sur la perte subite et " insensée " d'un être cher, nous conduit vers les rivages de la guérison en empruntant le langage de la poésie évocatrice, car vaine est, dans ce domaine, la révolte et la violence. Seule la douce et lente mémoire est le baume qui guérit nos blessures.
Mais l'expérience du deuil est une blessure difficile à vivre dont la guérison, lorsqu'elle survient, est comme le vol léger et vif des oies sauvages qui balaient le ciel au-dessus de la mer gaspésienne, cap vers les contrées de l'infini. Une nouvelle compréhension de l'expérience ultime de la vie qu'est la mort.
Nous comprenons alors que rien ne vaut de retenir l'envol final de l'être aimé accomplissant ainsi sa liberté. Et rien ne vaut de se river au sol de notre tristesse.
Si on lève les yeux vers le ciel, on verra les voiliers géants d'oies sauvages nous entraîner dans le sillon d'un jour nouveau.

* * * * *

Nous sommes souvent portés à croire le contraire, mais rien, jamais, ne nous appartient. Pas plus le corps que l’on habite que les vêtements qui l’habille. Pas plus la maison où l’on se terre que les draperies qui en obstruent les fenêtres. Pas plus la chair de l’être aimé que son esprit qui la meut. Tout nous est seulement prêté.
Pendant des années, j’ai cru être ton homme. Nous avons souvent agi comme si nous n’étions qu’un. Pourtant, tu ne m’as jamais laissé de « je t’aime » au bas d’une lettre écrite un soir, au coin du feu. Tout ce que j’ai trouvé de toi, c’est un corps privé de vie. Est-ce vraiment ce que tu voulais ? On croit généralement que les proches d’un grand malade sont ceux qui souffrent le plus, surtout quand on suppose que la personne atteinte est devenue inconsciente de ces actes. Moi aussi, je l’ai cru. Que n’ai-je eu l’inspiration de te venir en aide bien plus que je ne l’ai fait. Comment ai-je pu ne pas comprendre ta colère et ta frustration de te sentir en perte de toi-même ?

Il y a quelques temps, je commençais à m’inquiéter pour ta santé. Depuis quelque semaines, je remarquais certains changements dans ton comportement. Ainsi, tu pouvais me parler de ton premier mandat ou de tes exploits contre les Artésiens, ou de tes amis de jeunesse, mais tu étais incapable de te rappeler la raison pour laquelle tu te « réveillais ».

Les yeux rougis et l’âme fragile, je m’assieds sans permission en face de ton fauteuil, jamais dans ton fauteuil, et je repasse dans ma tête le fil de notre vie. Ce que je n’ai pas vu, je l’imagine.

Armure bourmonesque Nombre de messages : 3557 Date d'inscription : 08/06/2009

Je t’écris du bord de l’eau, là où règne le glacial février. Je parle d’eau, mais en vérité, c’est plutôt d’un désert givré qu’il s’agit, d’une plaine immaculée qui s’allonge à perte de vue, devant moi. Ce matin, il y règne une paix étrange, une fragilité cristalline, un vague sentiment d’éternité.

Je t’écris du bord de l’eau où la blancheur ne blesse pas encore les yeux. Le soleil qui se lève timidement derrière moi fait apparaitre des milliers de millions de diamants rosés, cristaux frigorifiés qui veulent nous faire croire que la neige de l’aurore est encore la seule richesse que peuvent s’offrir les handicapées de l’âme.

Je t’écris du bord de cette eau sur laquelle se lève le vent pour courir à fleur de banquise, prenant son élan avant de s’abattre sur moi, sur la maison, sur mon refuge sans chaleur et sans feu. Je t’écris … non … je ne t’écris plus. La tempête se fait trop violente et les bourrasques ont emportés tous mes mots.

Je suis désolé.

Armure bourmonesque Nombre de messages : 3557 Date d'inscription : 08/06/2009

Pourquoi suis-je incapable de trouver la paix ? J’ai l’impression que tu veux me dire quelque chose de très important. Je suis là, je tend l’oreille, j’écoute … mais je n’entends pas. Je ferme les yeux, puis je les rouvre. Je les ferme de nouveau pour tenter de faire le vide en moi, pour me laisser gagner par l’univers … Des cris me parviennent … les oies ? J’ouvre les yeux pour ne voir que mon ombre dessinée sur la neige.

J’ai toujours cru aux fantômes. Lorsque j’étais enfant, ils portaient des draps blancs sur la tête et avaient des chaines aux poignets. Maintenant, je crois qu’ils sont des souvenirs qui viennent nous hanter tant et aussi longtemps que nous leur donnons toute la place. En cela, je garderai le tien ici, loin des sourires moqueurs et des regards sceptiques. En aucun temps je ne révèlerai ta présence. Personne ne viendra troubler notre repos. Tu pourras errer à ta guise dans notre maison et flâner, la nuit, en tenant une lanterne.

Non, je ne suis pas fou. C’est plutôt ma façon d’apprivoiser ta présence. Un jour je serai l’exorciste de mes propres fantômes.

Armure bourmonesque Nombre de messages : 3557 Date d'inscription : 08/06/2009

Je t’écris du bord de l’eau, là où avril se découvre à peine. C’est parait il le printemps. Ce sont les outarde qui me l’ont dit en survolant le marais salant. Crois tu qu’elles ont raison ? Il semble encore si loin pour moi. Mon âme est l’hiver, mon corps a froid, mes yeux appellent les outarde.

Je t’écris du bord de l’eau, au bord du soir. De l’autre côté de l’onde, le soleil se prépare pour la nuit. Je pleure ma peine, je pleure ma nuit et tu n’y peux rien. Personne n’y peut rien, même les outardes qui m’ont dit … que m’ont-elles dis déjà ?
Je t’écris du bord de l’eau, au bord de la nuit, les étoiles se sont allumées et le ciel s’est éteint. Elle se sont rassemblées dans le marée, à marée basse, et elles se préparent pour leur très long voyage, je suppose.

Je t’écris du bord de l’eau, mais je ne le vois plus, simplement parce que la nuit est venu et que je dois fermer les yeux, poser ma plume et préparer, moi aussi, un très long voyage.

[Tu me tiens au courant. Si tu veux pas du post, MP et je vire Wink

]

L'avantage d'être un fantôme est l’absence du ressenti des températures. N'ayant pas d'enveloppe corporelle à proprement parlé, le Varennois ne ressentait pas le froid qui semblait s'être installé sur le royaume de France. Il souriait en voyant les membres de la demeure emmitouflés dans des dizaines d'épaisseurs. Lui, il était toujours habillé par les même habits que le jour de sa mort.

Son occupation du moment ? C'était de rire des gens qui glissaient sans cesse sur les plaques de glace formées il y a peu. Toujours invisible, il ne se lassait pas de ce spectacle. Même si lui aussi il aimerait pouvoir glisser sur cette glace ... Il aurait tant aimé former des boules de neige et mitrailler Kelso, il aurait aimé faire un concours de bonhommes de neige avec son ami, et pour sûr, le fantôme aurait gagné ! Tout le monde sait que Kelso n'a aucun don artistique !

Et c'est alors qu'il [Bibi] s'obstinait à attraper de la neige pour pouvoir connaitre l'effet produit, et pouvoir se sentir vivant un peu qu'il aperçut son ami. Grognon ou pensif, on ne pourrait le dire. Sa tête était cachée par des vêtements qui lui tenaient chaud. Et, au grand étonnement du fantôme, Kelso s'engouffrait dans la chapelle !

Bibi quitta ses occupations pour entrer lui aussi dans la chapelle - cependant en traversant le mur et non par la porte- curieux de connaitre ce qui tracassait tant son ami. Le fantôme ne dit mot. Il se plaça près du plafond, sur la tête d'une statue et regarda Kelso totalement silencieux. Et pendant que son ami était plongé dans ses pensées, le fantôme cherchait à comprendre ce qui le gênait tant ...

Et quand il fut las d'échouer à deviner, il s'approcha de son ami, s'assied à ses côtés et parla, sans le regarder.

Mon ami ... Il sourit. Voila bien longtemps que nous n'avons pas parlé. Et je pense que tu en as besoin ! Alors parles moi, je t'écoute attentivement.

Armure bourmonesque Nombre de messages : 3557 Date d'inscription : 08/06/2009

[Aucun souci, bien au contraire Wink

]

Il neige a plein ciel. Le vent s’est amusé à sculpter des congères tout autour de la maison. L’hiver s’est installé pour de bon. Je tremble à l’idée d’affronter seul le vent qui sifflera par les fenêtres mal calfeutrées de la paroisse. La poudrerie est elle que je ne vois plus la chemin qui passe à quelques mètres de la maison. La neige s’accumule sur la galerie qu’on a réparé en aout dernier. Qui donc le ferra la prochaine fois ? Y aura il même une prochaine fois ? Devrais je un jour quitter cette maison pour m’enterrer vivant dans un triste mouroir ?

Les mains recroquevillées, emmitouflée dans un couverture de laine, je laisse mes pensées vagabonder dans le temps. Peut être à cause du bruit que fait le vent dehors, je me sens transporté là où, il y a bien des années, nous avons affronté le froid en dignes habitants de ce duché nordique qui est le nôtre. Et puis, voila, qu’on m’appel … évidemment que je te reconnais. Cela faisait tellement de temps que tu n’avais daigné venir me faire un coucou, est-ce peut être le signe que j’allais mieux ?

Mon regard reste lointain, je te sais à mes côtés désormais.

Je suis las de lutter. J‘aimerai m‘endormir pour ne plus jamais me réveiller. Elle est gravement malade, chaque jour, je pris pour qu‘elle pense à respirer. Personne ne prit pour qu‘une personne respire, cela devrait être naturel.

Si elle trépasse, je partirai avec elle. Chaque jour, une partie de moi disparait pour la rejoindre.

Mon Bibi, pourquoi continues tu de errer parmi les vivants ? La vie de l‘autre côté n‘est elle pas apaisante ?

Le plafond était joli. Il était bien décoré, garni de nombreuses fresques mais en même temps si simple. Il n'était pas surchargé, il était plaisant à voir. C'est fou de se dire qu'on est dans cette maison depuis plus de trois ans et qu'on a encore jamais admiré cette œuvre. En même temps, on ne peut pas dire que les chapelles ou les églises soient les endroits favoris du fantôme.

Il avait écouté d'une oreille son ami en même temps que de contempler ce spectacle. Mais à présent qu'il était revenu à ses esprits il fallait répondre ! Mais surtout comprendre la détresse du brun. « Elle » ? Qui ça donc ? La vicomtesse ? M'enfin ! Elle a un fantôme attitré pour veiller sur elle chaque jour. Et il ne manquerait pas de prévenir Kelso immédiatement en cas de problèmes.

Partir avec elle ? Mais tu vas bien dans ta tête toi des fois ? Raccroches toi à la vie aussi longtemps que tu le peux.

Pourquoi rester à vos côtés ? Mais tout simplement parce que la vie est morne de l'autre côté ! Elle vous paraît si jolie, si joyeuse, si prometteuse mais elle ne l'est pas !

Je vais te dire, les premiers mois qui ont suivis ma mort, je suis resté auprès de mes semblables, les mourrus ! Il est vrai que je trouvais ça agréable. On pouvait faire tout ce qu'on voulait sans craindre des représailles le lendemain, sans craindre même de perdre la vie, puisque nous étions déjà morts ! Nous n'avions aucun besoin si ce n'est celui de nous distraire.

Il se remémora quelques défis lancés par ses congénères qu'il avait fièrement relevé.

Mais nous devions rester cachés, sans nous montrer aux autres. On se lasse des gens qui y sont. On n'a plus plaisir à faire quelque chose de risqué car il n'y a plus de risques réels ! On ne peut plus désirer quelqu'un, ça nous engage pour l'éternité. Et puis on ne mange plus, on ne boit plus. On ne connait plus tout les plaisirs qui nous paraissent si futiles lorsqu'on est en vie. Crois moi qu'ils manquent après.

Et puis il y a vous ! Toi particulièrement. Que deviendrais-tu si j'veillais pas à ta survie hein ? Tu serais déjà perdu ! Et puis j'aime espionner, m'amuser à ma façon, etc. Les vivants sont tellement plus heureux que les morts.

Il sourit et regarda enfin Kelso.

Es-tu convaincu ? Mes raisons sont-elles suffisantes ? Ou bien je dois en apporter d'autres ?

Armure bourmonesque Nombre de messages : 3557 Date d'inscription : 08/06/2009

Il écoutait oui mais il n’entendait pas. Il était la sans être là, c’était, chaque jour, de plus en plus difficile de sourire, de faire croire à un bien être. Bientôt, se serait l’anoblissement de Mac mais pourtant, il avait ce pincement au cœur. Il était ravi et fier d’en faire son vassal mais ca aurait du être Bibi et personne d’autre. Mac était un feu follet, Bibi était beaucoup plus posé et calme, il correspondait d’avantage aux attentes d’un Suzerain.

La vie après la mort, encore faudrait il qu’elle existe. Et si le fantôme de Bibi était une simple illusion, l’apparition d’un désir profond ? Il préférait penser que seul lui pouvait le voir, égoïstement.

Je ne sais pas-tu sais. Dans quelques temps, j’anoblis un jeune, tu sais, celui que tu t’étais amusé à faire peur, mais cela aurait du être toi. Je mettais toujours dis qu’on finirait lié par ce lien. Mais voila, je t’ai détesté tu sais tout comme je déteste Oks à ce moment précis. Vous partez tous, en égoïste que vous êtes mais vous ne pensez pas au mal que vous laissez derrière.

Je n’arrive même pas à regarder les femmes comme je devrais le faire. On me dit qu’il faut que je pense à mon héritier, mais avec qui ? Je n’en ai pas envie, c’est … étrange. Ne plus rien ressentir … ca doit être génial je pense. Tu n’as jamais su savourer que tu avais de toute façon, sauf peut être une chope de bière.

Il sourit en repensant au soirée en taverne de Varennes. Mon dieu, mais où était ce temps ? Vivre dans le passé est dangereux.

Je pris pour qu’elle soit enfin heureuse et apparemment, c’est loin de ce monde qu’elle le sera. Il parait que si on aime une personne, vraiment, on doit la laisser partir, c’est hypocrite tout simplement. Qui rêve de voir un être cher partir ?

Il ferma les yeux et reprit une prière improvisée puis marmonna :

Merci d’être la.

Tu parles du blond tout maigrichon ? Ah tiens, ça fait longtemps que je ne suis pas allé le voir lui ... Il y a une cérémonie ? Tiens tiens, je vais peut être allé m'amuser un peu moi.

Il sourit, malicieux. Des centaines d'idées germaient dans sa tête. Rien que son apparition devrait effrayer les convives, mais si en plus il parlait et foutait le bordel, dans ce cas là, la demeure serait encore plus vide que maintenant ! Au moins, le fantôme pourrait enfin faire la sieste tranquillement, sans entendre sans cesse des femmes parler de leur vie ! Mais bon, Kelso risquerait de ne pas apprécier... Il effaça ses idées machiavéliques de sa tête et reprit.

Je suis touché que tu es pensé à moi pour cet anoblissement. Cependant, lui est plus jeune, il faut se tourner vers l'avenir mon ami !

Et tu sais, on ne choisit pas quand la mort vient te chercher, même si quand elle est venu à ma rencontre, je n'ai pas vraiment résisté ... On ne peut pas dire que j'étais dans une bonne période !

Il haussa les épaules. Qui restait-il depuis sa mort ? Il avait entendu beaucoup d’annonces de morts, tous des gens qu'il avait connu, qu'il avait côtoyé, avec qui il avait bu un coup ! Si il refaisait son apparition en Champagne, il ne connaitrait pas une seule personne. Tous des inconnus, jeunots et innocents. Des "jeunots" qu'il aurait bien éduqué tiens ! Comme on faisait à l'époque à Varennes !

Bah, elle vivra toujours, comme moi !

Lui tapote la tête. Euh, ah non on tapote pas plutôt le cœur d'habitude ? Bref, tant pis.

Ici là dedans ! A moins que tu nous oublies, mais alors j'te foutrai mon pied aux fesses pour t'en souvenir !

Il manqua de rire et se mit à flotter, comme allongé sur un petit nuage, regardant le plafond en chantonnant un air plutôt joyeux. Et dans sa béatitude il répondit comme un murmure.

Je le serai toujours.

Il laissa filer les minutes, profitant un peu de tout, de la présence de Kelso, du calme qui régnait dans la chapelle et de son décor. Il ne fit pas attention au temps qui passa.
Et quand il fut las d'attendre à ne rien faire, il se redressa, sourire aux lèvres.

Que dis-tu de nous changer les idées et de nous amuser ? J'ai cru voir qu'ils refaisaient les plantations plus loin là. On pourrait aller les "aider" ! Ou alors faire courir Gab en piquant quelques bouteilles dans sa cave personnelle ! Ou tu as d'autres idées comme celles-ci ? Voila longtemps que nous n'avons pas vadrouillé ensemble !